Je ne suis pas raciste. Je ne suis pas homophobe. Je ne suis pas perverse. Je ne suis pas gérontophobe. Je ne suis pas xénophobe. Je ne suis pas difficile culinairement parlant.
Je ne suis pas difficile du tout, en fait.
Pourtant, je suis loin d'être un ange. Car moi qui me targait d'être l'apologie même de la tolérance il y a quelques années, j'ai découvert que j'étais en réalité connarphobe. Et je suis intolérante pour les intolérants, donc intolérante envers moi-même.
Ce qui m'a donné envie d'écrire cet article, c'est d'avoir croisé une femme il y a 20 minutes au carrefour market de mon quartier; la cinquantaine mal tassée, le cheveux gras, teint, et dont on voit la racine grise argentée, le teint pas frais - et j'en suis sûre, alcoolique - elle rôde déjà dans le magasin désert quand je passe les portes automatiques. Moi je me suis résolue à juste aller chercher mon pain complet ici puisque la boulangerie est fermée. Je me saisis de ma boule de pain, puis me dirige vers les caisses vides.
Mais voilà, je n'avais pas anticipé la connerie de ce personnage qu'était cette femme peu ragoûtante. En me voyant me diriger vers les caisses, prise de panique, elle se met à COURIR pour passer la première. Et là, je l'ai vue ; j'ai vu la connerie qui émanait de cette femme. Ca formait un halo qui me révulse, et j'ai dû me pincer pour pas grimacer.
Je fais donc la queue derrière elle, m'attendant à voir surgir d'autres conneries, car quand ce halo colle à quelqu'un, c'est pour tous ses actes de la vie quotidienne : ses courses, bien sûr, mais aussi le coiffeur, le tabac presse, le poissonnier, la conduite etc... elle ne pouvait donc pas se contenter de courir à la caisse pour être la première.
Elle dit à peine bonjour à la caissière qui passe ses 3 articles.
"Ca fait 8€43."
Cette femme n'aurait pas eu la présence d'esprit de chercher son porte monnaie ou de commencer à ouvrir son sac à main aussi bordélique que le mien avant que la caissière n'attende la monnaie. Elle essaie donc d'ouvrir son sac, pas de bol (ou mauvais coup anticipé?) la fermeture éclair bloque.
"Vous avez des sacs?
- oui, à 20centimes?
- oui.
- ça fait 8€63."
Mais le problème de la fermeture éclair ne se résoud pas en demandant un sac plastique. Finalement, avec un grognement, elle parvient à la forcer. Fouille dans le sac. Finit par sortir le porte monnaie.
"C'est combien déjà?
- 8€63."
Elle lui tend le billet de 10€ qu'elle tenait déjà dans sa petite pogne. 8€63 ou 8€90, ton billet aurait suffit, t'inquiète.
Elle attend patiemment, passive, que la caissière lui rende la monnaie. Elle prend les pièces, le ticket, et les étale sur le tapis roulant pour vérifier le compte.
...
Puis enfin, elle consent à mettre ses courses dans son sac. Puis il faut ranger la monnaie, elle trie presque les pièces.
La caissière, sentant qu'elle va devoir bientôt gérer un meurtre à main nu à cause de la cliente que je suis, décide de m'encaisser. Puis après j'ai fuis, fuis car le halo commençait à me contaminer.
Je suis sûre qu'à force d'y être exposée, moi aussi je suis en train de devenir une vieille conne. Ca m'inquiète beaucoup. Pour l'instant je n'en suis qu'au stade où je grogne dans ma tête et sur ce blog, mais à quand le passage à l'acte? Bientôt je ferai une remarque désobligeante qui ne servira à rien à part ralentir le connard (si c'est possible), et puis ensuite passerai-je aux actes? Serai-je capable de faire bouffer la monnaie à cette femme? De lui coincer mon pain complet dans la gorge?
Mes pulsions m'inquiètent. Peut-etre que je suis trop patiente avec les patientes et mes amis pour pouvoir l'être avec le parfait inconnu.
Mort aux cons.